Prescription

Nous sommes souvent contactés par des investisseurs malheureux qui ont acheté leur bien en 2007 et 2008 et qui s’aperçoivent que le prix de vente possible est souvent égal  au tiers du prix d’acquisition. Dans les simulations préalables à la vente, les commercialisateurs avaient au contraire laissé entrevoir une plus-value.

Les investisseurs lésés nous demandent alors s’ils peuvent engager une action.
La question qui se pose immédiatement est celle du délai pour agir, du délai de prescription. En effet, l’article 2224 précise que « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »

La difficulté est de savoir ce qu’il faut entendre par « a connu ou aurait du connaître les faits. »

Pour le moment, il n’y a que peu de jurisprudence de la Cour de Cassation et les décisions de la Cour d’appel sont souvent contradictoires. Il faut donc les scruter et les examiner attentivement, ce que nous faisons quasi quotidiennement.

Deux arrêts ont attiré notre attention :

Le premier de la Cour d’appel de Bastia en date du 10 Février 2016. (N° 14/00102).
Cette décision donne, certes, tort aux investisseurs malheureux mais reconnaît que le délai de  prescription à l’encontre du notaire ne commence que lorsque le préjudice s’est révélé dans son intégralité, « Sur la prescription » :

La prescription applicable à l’action engagée contre le notaire sur le fondement de l’article 1382 du Code civil est la prescription quinquennale édictée par l’article 2224 du Code civil. Selon ce texte, la prescription court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

En l’espèce, si le procès-verbal de réception du 7 mai 2007 contient expressément la constatation de la non réalisation des cuisines supplémentaires à la fourniture desquelles s’était engagée la société venderesse, et de la nécessité de certaines reprises, sans plus de précisions, aucun élément concernant un quelconque manquement du notaire quant aux obligations en matière de vente en l’état futur d’achèvement n’est relevé ; on ne trouve pas non plus dans ce document de mention relative aux non-conformités électriques qui ont été révélées ultérieurement dans le courrier du 30 juillet 2009.

En réalité, il n’est pas démontré que, dans les 5 années précédent l’exploit introductif d’instance, le dommage aujourd’hui invoqué par les époux P. comme étant la conséquence des fautes du notaire, s’était révélé dans son intégralité.
Le second arrêt est de la Cour d’appel de RIOM du 10 Octobre 2016 (N° 15/01794). L’argumentation des demandeurs était fondée en partie sur le dol et les investisseurs avaient reçu un courrier dans l’année qui avait suivi leur acquisition, duquel il ressortait qu’ils avaient été informés de la baisse des prix. La prescription courait donc à partir de la réception de cette information. Ils étaient donc prescrits. Mais, cette décision est plutôt favorable aux investisseurs lésés car le délai pourrait courir à compter du jour où un agent immobilier a informé de la valeur du bien, la tentative de vente intervient souvent à l’expiration du délai de neuf ans. Donc pour les acquisitions remontants aux années 2007/2008, il serait possible d’agir.

« Attendu, concernant le dol, que les époux B. DE A. reprochent à la SCI LE JARDIN DES SOURCES d’avoir commis à leur préjudice des « manipulations » et de leur avoir menti quant à la valeur du bien, présenté sous un jour flatteur alors qu’en réalité il était largement surestimé par rapport au marché immobilier local ; qu’ils rapportent à ce propos des exemples de prix glanés sur Internet en octobre 2013 (environ 60 000 EUR) et une estimation faite par un agent immobilier en février 2014 (idem) ;

Attendu que si effectivement le bien acquis pour 170 090 EUR au mois de mai 2007 ne valait alors guère plus du tiers de ce prix, les époux B. DE A. pouvaient facilement s’en apercevoir en prenant quelques renseignements sur l’état du marché immobilier local, comme le ferait tout acheteur moyennement diligent désireux de se lancer dans un tel investissement ;

Attendu qu’à tout le moins, comme l’a exactement observé le Tribunal de grande instance, il résulte du dossier que les acquéreurs ont été informés par le gestionnaire du bien au mois de mars 2008 de la baisse du marché liée à la multiplication des programmes immobiliers dans le même secteur, et de la difficulté de maintenir le loyer initialement prévu, ce pourquoi par un avenant du 17 mars 2008 les époux B. DE A. ont reçu en compensation la somme de 1 829 EUR. »

Auteur : Me Thibault du Manoir de Juaye, avocat à la Cour.
Publié par Erin B. le 15 mars 2017.

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