Une décision de justice difficile à accepter

La Cour d’appel de Toulouse a rendu le 5 Février 2020 une décision en faveur d’AKERYS EDELIS et au détriment d’investisseurs lésés dans une opération de défiscalisation. Il faut souhaiter que ces investisseurs lésés se pourvoient devant la Cour de Cassation.

Et, comme cela est fréquent, le promoteur s’est retranché derrière la prescription pour échapper à ses éventuelles responsabilités.

Les investisseurs lésés soutenaient que l’appartement n’avait pas été loué au prix annoncé dans la simulation, qu’ils ne savaient pas qu’une carence locative de 12 mois entrainait une perte des avantages fiscaux et qu’il y avait une surévaluation du prix d’achat. Des arguments donc assez classiques.

La Cour d’appel a répondu à ces arguments en expliquant que :
« c’est à juste titre que le premier juge écrit, … et que le point de départ de la prescription ne pouvait être fixé au gré de leurs intérêts au moment où le déséquilibre potentiel de l’opération se révèle insupportable après un renversement de conjoncture et après la sortie des avantages fiscaux dont ils ont bénéficié ».

Cette motivation n’est pas acceptable au regard des dispositions de l‘article 2224 du Code civil qui définit comme point de départ de la prescription « le jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

De cette définition, il résulte que le point de départ de la prescription est devenu subjectif et non plus objectif comme il l’était auparavant.

La Cour reproche à plusieurs reprises aux investisseurs de ne pas s’être renseignés sur l’état du marché tant locatif qu’à la revente. Elle fait alors peser une obligation de renseignements sur les investisseurs en lieu et place de l’obligation d’information qui pèse sur les commercialisateurs mandatés par le promoteur et ou ce dernier. En l’espèce, aucune information n’est fournie sur les modalités de la vente et sur un éventuel commercialisateur qui n’est pas dans la cause.

Ces motivations appellent les remarques suivantes :
La multiplication de programmes au même endroit et dans un temps très rapproché crée des bulles immobilières de manière artificielle et dès lors l’investisseur achète peu ou prou au prix du marché du neuf.

Ces bulles immobilières se dégonflent cependant de manière très rapide et souvent dès le terme de la période d’immobilisation fiscale et ce, pour au moins deux raisons :
1) Après une dizaine d’années le bien acheté neuf est considéré comme de l’ancien, ce qui entraine mécaniquement une baisse des prix puisque le prix de l’ancien est souvent inférieur  à celui du neuf dans des proportions variant parfois du simple au double et ce surtout si l’immeuble est de piètre qualité.

2) A l’issue de la période d’immobilisation fiscale, tous les copropriétaires vendent en même temps et l’accroissement de l’offre entraine une baisse des prix.
Un commercialisateur d’un produit immobilier de défiscalisation, qui cache souvent ses liens avec le promoteur se doit d’informer l’investisseur potentiel de ces éléments. En effet, tout le monde sait que l’immobilier fluctue, comme l’a rappelé la Cour d’Appel, mais il n’est pas possible à un acheteur novice d’envisager l’ampleur des fluctuations s’il n’est pas informé des éléments qui viennent d’être rappelés.

Rappelons que comme tout mandant, le promoteur est responsable des défaillances erreurs et omissions de ses mandataires en l’occurrence AKERYS.

 

Auteur : Me Thibault du Manoir de Juaye, avocat à la Cour.
Publié par Erin B. le 31 mars janvier 2020.

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